vineri, 31 mai 2013

La Géographie D'environnement




          
          Par environnement en géographie, on doit entendre le milieu aménagé par les sociétés. Il s'agit donc d'envisager comment la société utilise le milieu, "l'épiderme de la terre", et quelle place revient à celui-ci dans le choix des aménagements et leur gestion.
         La géographie désormais bien ancrée dans les sciences sociales place au cœur de son discours la société, qui s'inscrit dans le géosystème composé de l'atmosphère, la lithosphère, l'hydrosphère et la biosphère. Ces éléments qui ne sont pas neutres,  interviennent à des degrés divers sur les choix d'aménagement et d'organisation  de l'espace que les sociétés effectuent.

La planète habitée - Le temps des sociétés

        Les sociétés ont depuis fort longtemps participé à la dynamique des milieux physiques. Les hommes du Paléolithique ont  faiblement contribué à la transformation du milieu en raison de la faible pression qu'ils exerçaient sur celui-ci. Le Néolithique marqué par  l'invention de l'agriculture,  la domestication des animaux, l'importance de la poterie qui permet d'effectuer des réserves, marque un changement radical dans les relations nature/sociétés. Désormais la sélection des espèces végétales, la déforestation participent à des modifications importantes qui affectent les couverts végétaux et se traduisent sur les sols.
       L'impact des sociétés sur la nature n'est pas linéaire, se succédent des périodes où la pression est forte et d'autres où elle se relâche. Ainsi la période gallo-romaine au moins dans le sud de la France se caractérise par d'importants défrichements, une transformation considérable des paysages végétaux, en revanche  au début du Moyen Age, la forêt regagne du terrain et les espaces mis en culture  reculent.
Plus récemment, une  forte pression démographique s'est exercée dans les montagnes françaises, ainsi au XVIII, XIXe siècles se sont multipliées les preuves d'une aggravation de l'érosion des sols sur les pentes, d'une augmentation de la torrentialité.
Au XXe siècle la pression des sociétés sur le milieu tient principalement, dans les pays riches, aux effets de l'urbanisation et de l'industrialisation. Les pollutions et les risques technologiques deviennent des réalités majeures.
       Ce rapide constat  montre qu'alternent des temps d'assoupissement dans l'action des sociétés sur la nature et des temps de forte pression et d'importantes modifications selon des modalités variables avec le type de société. Ces différents aspects des interactions société/nature varient aussi selon le lieu considéré, ainsi dans les pays pauvres l'impact de l'agriculture, le rôle de la déforestation demeurent fort à la différence de ce qui se passe aujourd'hui en Europe marquée par un reboisement considérable (la forêt française est passée de 7 millions d'hectares en 1789 à 16 millions aujourd'hui).  

Les composantes du géosytème

      La nature recouvre plusieurs éléments qui interagissent les uns avec les autres : l'atmosphère, la lithosphère, la biosphère et l'hydrosphère.


     La lithospère  regroupe le relief, les types de roches et les sols quand ils existent sur le substrat rocheux. L'évolution de la lithosphère s'effectue à l'échelle géologique, il faut  des dizaines de millions d'années pour que se mettent en place les grands volumes qui constituent l'ossature des paysages. Les formes et les modelés se développent sous l'effet des processus d'érosion, à des échelles moins longues mais qui dans bien des cas impliquent des milliers d'années ou davantage (pour modeler une vallée, construire des terrasses..).
Les sols, pellicules provenant à la fois de l'attaque des roches sous jacentes (altération physico-chimique) et des apports des éléments végétaux (litière, et humus), se forment selon des rythmes millénaires ou au mieux centennaux.
Certains éléments de la lithosphère peuvent être envisagés en terme de ressources pour les sociétés, c'est le cas des sols,  des ressources minières et des énergies fossiles.

       L'hydrosphère est  un élément fondamental de la vie sur la terre. L'eau est une ressource renouvelable. Il est nécessaire de comprendre et de connaître les composantes du cycle de l'eau, l'inégale répartition de celle-ci en fonction des données climatiques, et l'importance des ressources souterraines (nappes).
       Les cours d'eau ou les lacs  ont contribué à fixer l'habitat en raison de l'existence de la ressource (usages domestiques), de la pêche, du rôle défensif des cours d'eau et des lacs (habitat sur pilotis ou dans des îles). L'eau a servi aussi pour des usages artisanaux : moulins, pour la navigation, la production d'énergie… L'eau  a été utilisée très anciennement pour l'irrigation et cet usage ne cesse de s'accroître, l'eau  peut aussi avoir des usages touristiques et industriels. Elément important d'organisation de l'espace,  elle  est aussi un élément paysager.
     On remarquera que l'eau ressource renouvelable, ne l'est pas totalement, des nappes fossiles existent dont l'usage pose de véritables problèmes en terme de développement durable. Faut-il les exploiter à grande échelle pour favoriser le développement de certaines régions du globe  ou faut-il gérer ce stock en envisageant  sa conservation partielle pour les générations futures.
Traiter de l'eau conduit aussi à des analyses géopolitiques, à envisager des besoins, des acteurs, voire des conflits à différentes échelles (Turquie, Syrie, Irak.. alimentation de la ville de Barcelone..).

      L'atmosphère est une "ressource " pour les populations. L'air est nécessaire à la vie, sa qualité est donc un élément important.
     Connaître les bases du découpage climatique zonal et les caractères des climats envisagés à différentes échelles jusqu'aux climats locaux est indispensable. Les activités humaines contribuent à modifier le climat de la ville, plus la ville est grande et plus l'îlot de chaleur urbain est considérable. A l'échelle planétaire, la question se pose du changement climatique global en relation avec l'augmentation de l'effet de serre d'origine anthropique.
       Les climats ont enregistré  au fil du temps, des modifications considérables: fluctuations majeures au sein des ères géologiques (climat chaud plus ou moins humide dans les régions qui composent l'Europe au Tertiaire), puis de durée moindre (quelques dizaines de milliers d'années à 100 000 ans), ainsi au cours du Quaternaire ont alterné des épisodes froids et d'autres plus tempérés. D'autres modifications ont une durée qui ne dépasse guère le millénaire, c'est le cas à l'Holocène. Des  oscillations plus courtes encore existent, d'importance  centennale ou pluri-centennales, le Petit Age glaciaire (PAG) en témoigne, qui s'est caractérisé par l'avancée des glaciers montagnards entre le XVe siècle et la fin du XIXe. Nous sommes aujourd'hui dans un épisode de réchauffement d'ampleur et de durée indéfinissables. Est-il accentué par les rejets de gaz à effet de serre?  Que penser des modèles proposés qui  établissent l'ampleur du réchauffement  à prévoir dans les dizaines d'années à venir, c'est à dire à très court terme,  accompagné de scénarios catastrophes associés (montée du niveau marin..). 
      De plus en plus de chercheurs réenvisagent avec du recul les modèles proposés, qui suggèrent des situations elles-mêmes fonctions des informations choisies afin d'établir ces modèles. S'il est impossible de considérer  comme acquis ce qui relève de suppositions,  il est certainement nécessaire de mettre en  œuvre le principe de précaution pour limiter les rejets de gaz à effet de serre.
Dans ce domaine, comme dans la plupart de ceux qui touchent à l'environnement, les arrières pensées économiques et idéologiques ne sont jamais très  éloignées!

     La biosphère comprend la forêt, les savanes, les prairies, la toundra (et les animaux associés) et les agrosystèmes, c'est une ressource fondamentale pour l'humanité. Il est nécessaire de bien définir les grands biomes, d'être capable de les localiser par rapport notamment aux  espaces de peuplement. Les formations végétales  présentes sur les continents ont beaucoup évolué au fil du temps et cela de manière "naturelle"dans un passé très reculé. Ainsi, entre la forêt qui occupait l'Europe au Tertiaire et la forêt qui a repoussé après les grands froids quaternaires, il y a peu de ressemblances, les espèces végétales de milieu chaud ont disparu, éliminées par le changement climatique qui a marqué le passage Tertiaire/Quaternaire. Les changements, les adaptations aux modifications climatiques se sont effectués tout au long des temps géologiques, y compris au cours de l'Holocène marqué par des fluctuations relativement courtes (de l'ordre du millénaire). 
        Cela signifie que même  en faisant abstraction  des actions anthropiques, il n'existe pas de "temps zéro"  de la forêt ou des autres formations végétales. Si tel était le cas, faudrait-il le placer à la fin du Tertiaire, au Quaternaire, au début de l'Holocène, avant Jésus Christ?
Les sociétés  ont agi sur les couverts végétaux, elles ont défriché, substitué des formations végétales à d'autres, modifié par une sélection déjà fort ancienne les types de végétaux et les associations végétales. On ne peut leur imputer que des effets négatifs, ainsi  en l'absence d'intervention humaine les zones humides se boisent, se ferment et voient leur biodiversité diminuer..
     Le couvert végétal, notamment quand il est formé, autrement dit quand il couvre totalement le sol, constitue un écran important pour les sols, limite l'action des gouttes de pluie, et réduit l'érosion mécanique, notamment le ruissellement. La disparition des couvertures végétales favorise celle-ci comme en témoigne les travaux effectués en Afrique tropicale ou en Amérique tropicale, des résultats du même type concernent aussi  les régions du bassin parisien et plus généralement d'autres secteurs de grande culture en Europe.

 

Les rapports nature/société. la problématique des risques

       Les  données physiques du géosystème agissent sur les sociétés au titre des aléas et des risques. La notion de risque devenue à la mode aujourd'hui est d'abord une approche sociale que l'on peut envisager comme résultant de l'action de processus physiques, des aléas, sur un groupe social vulnérable.
Les aléas et les risques peuvent être d'origine lithosphérique: les mouvements de terrain; les volcans, les séismes en sont les expressions les plus marquantes. Ils peuvent être atmosphériques, cyclones, tempêtes, sécheresse, pluies très violentes, coups de froid, fortes chutes de neige.
Il existe aussi des risques liés à l'eau: inondations en particulier et  avalanches.
Les processus de forte intensité à l'origine de l'aléa et du risque n'ont rien "d'anormal" dans le fonctionnement du géosystème. Ils sont "normaux" y compris quand ils sont de forte intensité, ils ne deviennent risque et catastrophe que parce que la société les perçoit ainsi.
     Le climat défini par des moyennes de précipitations, de températures, de force des vents présente normalement des écarts aux moyennes  qui sont précisément  sources de risque. Les aménagements, la gestion des milieux, la facture énergétique sont  fondés sur des températures et des hauteurs de précipitations définies statistiquement ; si l'hiver est plus froid ou plus neigeux que "la norme", l'écart peut être perçu en terme de risque par les populations, mais cela ne signifie pas que le climat change. Il s'agit seulement d'écarts certes plus ou moins marqués et à ce titre plus ou moins rares, qui appartiennent aux fonctionnements ordinaires de la planète.

      Les aléas sont inégalement répartis à la surface des continents, certains secteurs, très peuplés, sont soumis à des aléas multiples, c'est le cas du Japon. D'autres subissent des aléas et des risques plus modérés, l'Europe dépourvue au moins dans sa partie autre que méditerranéenne de grands aléas sismiques, loin d'un volcanisme actif et sans cyclones, fait partie de ces espaces relativement épargnés bien qu'elle enregistre des tempêtes littorales et des pluies  suffisantes pour  provoquer des inondations.
Il existe une inégalité évidente face aux aléas et aux risques. Les risques, révélateurs des inégalités sociales,  affectent plus les pauvres que les riches qui savent mieux se préparer à la catastrophe possible. L'existence d'un Etat efficace, bien relayé au sein des régions est un facteur de meilleure prise en compte du risque, d'une prévention et d'une éducation des populations mieux réalisées.
       Les risques sont particulièrement  difficiles  à intégrer aux politiques urbaines dans les espaces déjà bâtis, ainsi dans les pays en développement, les villes qui se sont fortement développées au cours des dernières décennies, présentent de vastes quartiers soumis aux risques. Les villes des pays développés ne sont pas davantage épargnées,  lorsque la croissance urbaine du XXe siècle s'est effectuée dans les lits majeurs des cours d'eau..

         L'approche environnementale que nous venons d'ébaucher peut se lire à différentes échelles spatiales et temporelles. Les relations à la nature ont varié au fils des temps,  la dépendance des sociétés à la nature était plus grande dans les siècles passés, au cours desquels les activités artisanales et l'urbanisation se traduisaient  déjà localement par une forte dégradation du milieu. Des maladies récurrentes  caractérisaient les villes en été (choléra, dysenteries à Marseille, Annonay, Paris..).
       Les relations des sociétés à la nature varient selon les sociétés, leur développement économique, technique, leur culture.. Certains  groupes sociaux habitent et aménagent la montagne quand d'autres la fuient, sans que les facteurs physiques justifient ces montagnes vides et ces montagnes peuplées.  Quoi qu'il en soit, les usagers de la montagne doivent tenir compte de l'étagement bioclimatique, de l'instabilité des pentes. Le tourisme d'hiver  s'adapte aux possibilités d'enneigement bien que la neige artificielle parvienne à pallier pour partie la défaillance climatique.

      L'étude de l'environnement peut s'effectuer par le mode d'entrée que je viens de présenter mais on conçoit aisément qu'elle puisse se faire par d'autres entrées